- Qu'est-ce que tu fais là, Megan ?
- Devine.
A ma grande surprise, ma voix était presque aussi cassée que la sienne.
- T'aurais pas dû venir.
- T'aurais pas dû faire cette connerie.
Dans son regard, je pus voir un mélange de reproches, mais aussi de douleur, et même d'inquiétude.
- T'aurais pas dû venir, répéta-t-il.
Ne détachant pas mes yeux des siens, je cherchai à trouver des réponses dans son regard. Alors, c'était bel et bien fini.
- Bon, soufflai-je, puisque tu es tiré d'affaire... Je vais rentrer.
Je me levai et me dirigeai déjà vers la porte de sa chambre. Sans me retourner, je lançai une dernière fois, par-dessus mon épaule :
- Prends soin de toi Luca, vraiment.
Ma main se posa sur la poignée, et je sentis une partie de mon c½ur se déchirer. J'étais pressée de partir d'ici pour laisser libre cours à mes pleurs, quand-
- Attends...
Un souffle.
- Me laisse pas...
Un murmure.
Je me retournai pour faire face à un jeune homme bouleversé, anéanti. Je revins – plus vite cette fois – vers son lit et nous nous jetâmes dans les bras l'un de l'autre, malgré sa faiblesse. Mes lèvres se posèrent doucement sur les siennes, inquiètes de le brusquer dans l'état où il se trouvait. J'avais l'impression de le retrouver enfin. Comment pouvait-on perdre quelqu'un plusieurs fois en une seule journée ? Je suis là, Luca, ne pleure pas. Je suis là. Il prit ma main dans la sienne et la porta à son visage, fermant les yeux. Lui fredonnant une chanson qu'il m'avait écrite un jour, je posai ma tête sur son c½ur. Pourquoi devait-on continuer à nous déchirer un peu plus chaque fois alors que l'on était tous les deux incapables de vivre l'un sans l'autre ?
Nous restâmes un moment dans cette étreinte, aucun de nous deux n'étant prêt à relâcher l'autre, comme si séparer nos deux corps revenait à séparer nos deux c½urs une fois de plus, comme si nous détacher l'un de l'autre serait... définitif. Je fus prise d'angoisse tout d'un coup, mais le baiser que Luca déposa au coin de ma bouche me détendit. Je dénotai cependant dans celui-ci une pointe de... résignation ?
- Tu ne me dis pas tout...
Ce n'était pas une question.
- Qu'est-ce qui s'est passé dans ton c½ur et dans ta tête pour en arriver à de tels extrêmes ? Il FAUT que tu me parles, Luca, tu ne t'en sortiras pas tout seul...
Il sembla hésiter, ouvrit la bouche et... c'est le moment que sembla choisir mon ventre, lui aussi, pour s'exprimer. Un faible sourire passa sur le visage de Luca avant qu'il ne me dise, amusé, d'aller manger quelque chose.
- J'en ai pour 5 minutes, je vais juste m'acheter un sandwich à la cafeteria de l'hôpital. Tu veux quelque chose ?
Il me répondit par la négative et quelques rapides baisers, et je sortis. Elliott n'était plus là, et je ne pus m'empêcher de noter mentalement que je devrais en toucher un mot à Luca. La façon dont il avait traité son frère était tellement injuste. Tous les deux avaient vécus des épreuves particulièrement difficiles étant jeunes, et comptaient aujourd'hui énormément l'un sur l'autre au quotidien pour affronter le dur monde de la musique. Leur relation très fusionnelle surprenait d'ailleurs beaucoup de monde, mais semblait pourtant évidente dès lors qu'on les connaissait bien. Je continuai de débattre sur le sujet, quand un homme me percuta violemment.
- Désolée ! Excusez-moi, je-
Ma voix fut coupée à la vue de l'homme en question. Un de ceux que j'avais le moins envie de voir, à l'heure actuelle. Il avait l'air particulièrement énervé, furax même, et je doutai fort d'en être le motif principal. Ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'il me vit.
- Megan ?
- Gary...
Son visage se recomposa et il me prit de haut.
- Qu'est-ce que tu fais ici ?
Hors de question de me laisser faire par ce sale type.
- Je pense que vous le savez parfaitement.
- Mais... Tu ne vas pas me dire que...
Il se mit à rire et son éclat me prit de court.
- Non, ne me dit pas qu'il ne l'a toujours pas fait ?
- Je vous demande pardon ?
- Luca... Il n'a toujours pas réussi à te virer définitivement de sa vie ? Haha, non, c'est trop fort... Dans le genre acharnée ! Quand est-ce que tu lui fouteras la paix ? T'en as pas marre d'insister ?
Comment osait-il me parler ainsi ? Je n'allais certainement pas m'écraser devant ses propos, aussi blessants soient-ils.
- Vous n'avez aucun droit de me parler comme ça. Je n'interfère pas dans vos affaires, je me tiens dans l'ombre des journalistes, et concernant l'interview qui a été publiée, je n'y suis pour rien, alors foutez-nous la paix, pour changer ! Laissez-nous être heureux, merde ! Vous ne voyez pas tout le mal que vous faites à Luca, avec vos chantages à la con ? En quoi est-ce que notre histoire peut changer quelque chose au groupe ?!
Nullement impressionné par le flot de parole que je n'avais pu contenir, il poursuivit.
- Non, chérie, je crois que t'as pas tout à fait compris. Ta magnifique histoire d'amour à l'eau de rose avec Luca, c'est dans ta tête, et contrairement à ce que tu crois, SI, ça interfère dans nos affaires. Pourquoi ? Parce que tu détruis le moral de Luca, et donc son efficacité au sein du groupe. T'es sans doute trop obsédée par ta petite personne pour t'en rendre compte, mais Luca en as RAS-LE-BOL de toi. Ca fait 15 fois qu'il essaye de te quitter, en vain.
- Foutaises...
- Malheureusement pour toi, non. Pourquoi j'inventerais ça, dis-moi ? T'es insupportable ! Tu le harcèles, t'arrêtes pas de l'appeler, de le surveiller... Tu crois qu'il a que ça à faire d'entretenir une gamine dans ton genre ? Le problème, c'est qu'avec son grand c½ur, il n'ose PAS te quitter, il a trop peur de ta réaction, que tu veuilles crever ou un truc du genre... Au final c'est lui qui essaye, tellement il en peut plus, de cette situation ! Ah, ça, tu peux être fière de toi !
- ARRÊTEZ !
Mon cri résonna dans le couloir de l'hôpital, et, noyée par mes larmes, j'enfouis mon visage dans mes mains.
- Arrêtez, je vous en prie... C'est faux, tout ce que vous dites est faux...
- Non, Megan, c'est la pure vérité. Il n'osera pas te le dire, comme il n'a jamais osé le faire jusqu'à aujourd'hui, mais s'il te plaît, rends-lui ce service et vas-t-en.
- C'est impossible... Luca m'aime, il m'aime autant que je l'aime... Vous mentez...
- Quoi, tu veux l'entendre de sa bouche ? Très bien, allons le voir, si tu insistes.
Je relevais les yeux vers lui, vidée de toute chaleur. Je n'arrivais plus à penser, tout se mélangeait en moi. Mon visage retomba vers le sol, lourdement.
- Viens.
Gary passa devant et me pris par le bras jusqu'à la chambre de Luca. Il ouvrit la porte, et me tira à l'intérieur, mais je ne pus toujours pas me résoudre à relever les yeux. J'avais si mal...
- Luca, il était temps que je prenne les choses en main. Je l'ai croisée dans les couloirs de l'hôpital, et j'en ai conclu que t'avais toujours pas trouvé le courage de la virer, donc je l'ai fait. J'ai peut-être été un peu trop franc avec elle, mais ça traînait depuis trop longtemps, cette histoire, il était temps que tu arrêtes de te pourrir la vie avec elle. Elle a pas voulu me croire, quand je lui ai dit que ça faisait une éternité que tu essayais de le lui faire comprendre, elle voulait l'entendre de ta bouche. Plus la peine de mentir, Luca, à toi la liberté ! Tu veux bien confirmer à Mademoiselle que je dis la vérité ?
Un blanc sonore régna pendant de longues secondes, dans la pièce, avant qu'un murmure si court et si faible qu'il en était presque inaudible sorte enfin de sa bouche.
- Oui.
Incapable de me contenir, je fondis sur le sol, pleurant en de gros sanglots, les joues brûlantes de larmes. Comment avait-il pu me mentir sur toute la ligne, me tromper ainsi ? Comment avait-il osé me regarder dans les yeux et me dire qu'il m'aimait, comment avait-il pu me faire l'amour et me murmurant des mots doux, comment avait-il pu me faire ça... Je croyais pourtant qu'il m'aimait sincèrement... Je lui avais consacré tous mes jours et toutes mes nuits, sacrifié pour lui tant de choses... Tout ça pour rien. Et aujourd'hui j'étais... seule.
- Megan, pars, maintenant, m'ordonna Gary. Tu as assez pollué Luca et le groupe avec ta présence indésirable. J'espère ne plus entendre parler de toi avant longtemps, pour ne pas dire jamais.
Douloureusement, je me hissai sur mes pieds pour m'élancer hors de cette pièce. Les couloirs blancs de l'hôpital défilaient devant moi, derrière moi et tout autour, mes pieds filaient l'un devant l'autre sans même attendre mes ordres. Bientôt, la capitale anglo-saxonne disparaissait derrière mes pas, derrière les roues du taxi, derrière les nuages au dessous de l'avion. Enfin, je rentrai chez moi, pleurant toujours l'homme que j'aimais plus que tout. Nous étions le 12 décembre 2007 et, à seize ans et demi, j'avais perdu l'homme de ma vie.
***
De retour à l'hôpital...
- Comment t'as pu lui faire ça... Comment t'as osé...
A son tour, Luca était en pleurs. S'il avait à peu près réussi à garder la face lorsque son manager l'avait exigé, il avait craqué dès le départ de Megan.
- On aurait parlé, elle et moi ! Je lui aurais expliqué, d'une manière ou d'une autre, mais PAS COMME CA ! Pas en reniant TOUT CE QU'ON AVAIT VECU DEPUIS UN AN ET DEMI ! T'ES VRAIMENT QU'UN ENFOIRE !
Appuyé contre un mur, les bras croisés, Gary regardait Luca avec énervement.
- Tu sais très bien que c'était le seul moyen. Remercie-moi, au lieu de chialer comme une fillette. C'est une bonne chose de faite. J'ai pas que ça à foutre que de m'occuper de cette fille. On va déjà avoir suffisamment de trucs à gérer, à commencer par la raison de ton séjour ici. Franchement, bravo, quoi. Les journalistes vont pas tarder à rappliquer, je leur dirais que t'as fait une mauvaise chute chez toi mais que tout va bien. T'as intérêt à t'en tenir aussi à cette version, quand tu sortiras d'ici. Je me suis chargé d'envoyer un démenti dans toutes les boîtes de presse du pays, pour dire que Megan n'était qu'un coup comme un autre et que l'alcool t'as fait dire n'importe quoi. Tu confirmeras bien sûr comme convenu lors de la conférence de presse que j'ai organisée dès que tu seras rétabli. Bon, je vais y aller, j'ai du boulot. Rétablis-toi vite, on a du boulot devant nous.
- Tu me dégouttes, Gary.
- C'est le business, mon pote. N'oublies pas que t'as signé un contrat.
Adressant un sourire radieux à Luca, il sortit de la chambre avec fracas. Le jeune chanteur était défait, et n'avait comme seule envie que de n'avoir jamais été sauvé par son frère, pour tomber à nouveau dans les ténèbres. Là, au moins, on ne souffrait pas. Là, on ne pensait plus au fait que la personne que l'on aimait plus que tout était partie à jamais. Là, on n'avait plus le c½ur en morceaux. Là, on n'avait pas à mentir au monde entier.
* "Once you sell yourself, it's over."
- Morgan Brittany .
Oui, je sais.
Merci de votre patience infinie, et j'espère que ce chapitre vous plaira.
Désolée encore de l'attente.
Je vous aime <3
ANGE-ELLE-HIC, Posté le dimanche 18 janvier 2009 14:19
It's ending ?! Ca peut pas se terminer sur un mensonge. Ca fait depuis novembre que t'as pas posté...
Je me hate de lire une suite.